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Dans un contexte de déploiement rapide des IA Génératives et de leur vulgarisation auprès du grand public, les enseignant·e·s s’inquiètent de ne plus pouvoir être capables d’évaluer correctement le travail de leurs étudiants à travers les devoirs et exercices donnés à faire à la maison.
UN MODÈLE À FAIRE ÉVOLUER ?
Et pour cause, le modèle d’hier, basé sur les cours magistraux, des examens de connaissance et quelques cours pratiques en marge du cursus théorique principal viennent juste de perdre toute sa pertinence. Il faut repenser nos méthodes d’enseignement pour que l’expérience d’apprentissage ne soit pas confinée à une longue et pénible séance de lecture intercalée de régurgitations cognitives. En 12 ans d’enseignement vacataire dans le supérieur, j’ai toujours vu mes interventions comme celle d’un facilitateur et pas celle d’un professeur solennel délivrant la bonne parole. La pratique a toujours pris beaucoup de place dans mes cours, y compris avec des classes de 80 élèves. Mais je reconnais que le défi n’est pas dans ma catégorie et concerne davantage les cours théoriques en amphithéâtre où — généralement — les professeurs eux-mêmes ne sont pas formés aux techniques modernes d’enseignement.
Ce modèle passablement archaïque est d’ailleurs soutenu par une structuration de l’enseignement supérieur qui met à l’honneur les cours magistraux délivrés par de brillants intellects et relègue les aspects pratiques aux TD tenus généralement par des doctorants. Le savoir encyclopédique encore célébré aujourd’hui souvent pour de mauvaises raisons, même s’il confère bien des avantages, ne semble plus complètement adapté au monde dans lequel nous vivons.
Bref tout le monde est flippé et pourtant c’est bien de ce « flip » (comprenez ici « inversé ») que vient la solution contre les effets de l’IA générative en classe.
LA CLASSE INVERSÉE
Dans son essai « I’m a student, you’ve no idea how much we’re using ChatGPT », Owen Kichizo Terry raconte par le menu son expérience avec le bot d’OpenAI et comment il lui sert à faire ses devoirs sans y réfléchir plus que ça. Son argument est celui-ci : à partir du moment où on a accès à ChatGPT, les devoirs qui demandent un certain de degré de réflexion perdent leur sens puisque ChatGPT offre ce service.
Une des solutions disponible pour faire face à ce problème : la classe inversée. Décrite en 1990 par Eric Mazur, la technique de classe inversée propose aux étudiants d’acquérir le savoir théorique chez soi à travers un ensemble de lectures, de vidéos ou de podcasts et de pratiquer en cours sous la supervision de l’enseignant. Le concept n’est pas nouveau biensur, mais il reste plus répandu aux États-Unis qu’en France, même si certains établissements d’enseignement l’utilise depuis une petite dizaine d’année. En 2017, on estimait que près de 20.000 enseignants en secondaire utilisaient cette méthode qui concernait 1 million d’élèves environ.
En cours, on va donc privilégier l’activation des connaissances et des compétences en favorisant les travaux de groupe, l’interaction, la présentation orale, le débat d’idée quand chez soi, l’étudiant aura du matériel engageant sur lequel travailler ses connaissances.
Cette simple proposition implique de tels changements que l’on comprend aisément que la révolution ne va pas se faire en un jour. Les résistances vont-être nombreuses et l’accompagnement des enseignant·e·s va devenir crucial pour ne pas créer du mal-être au travail, des sentiments de déclassement et une perte de vocation. Parce qu’au final, je suis pour le coup convaincu qu’il y a davantage de richesse dans l’interaction avec les étudiants que dans une lecture monocorde d’un cours.
