EN UN COUP D’OEIL
- L’IA, un gouffre énergétique : Les data centers, en pleine expansion, mobilisent jusqu’à 20 % de l’électricité dans certains pays, accélérant la crise climatique.
- Retour des énergies fossiles : Face à la demande, centrales à charbon et forages offshore sont relancés, freinant la neutralité carbone mondiale.
- Une ressource vorace : Eau, terres rares, émissions de CO2… L’industrie de l’IA menace directement les ressources naturelles et la santé publique.
Le boom de l'IA menace sérieusement le climat. Plutôt que de cheminer vers l’objectif de neutralité carbone prévu par les Accords de Paris, les grandes puissance mondiales sont actuellement en train de s’en détourner, notamment du fait de la voracité énergétique de l'ogre IA. Un appétit qui a pour effet collatéral de relégitimer la production d'énergie nucléaire ainsi que les sources fossile.
Électricité, eau, minerais : le boom de l’industrie de l’intelligence artificielle, un secteur qui pèse 200 milliards de dollars d’investissements (Goldman Sachs, 2023), menace très directement les politiques climatiques menées par les pays et les entreprises.
+ L’énergie est notre avenir, ne l’économisons pas. Le cabinet Deloitte projette que l’énergie utilisée par les data centers devrait tripler dans la décennie à venir (Rapport Powering AI, Deloitte). La banque d’investissement Morgan Stanley estime que 2,5 milliards de tonnes de CO2 supplémentaire seront produites par cette industrie seule d’ici 2030. Soit l’équivalent des émissions annuelles de la Russie (Morgan Stanley Research).
+ Aux États-Unis, pays qui concentre un tiers des datas centers du monde, la consommation électrique de ce secteur mobilise 8% du total de l’énergie produite (Goldman Sachs). En Irlande, c’est 20% (!!!) de l’électricité produite par le pays qui est mobilisée par les data centers (rapport de l’Agence Internationale de l’Energie). La France n’est pas en reste, souligne l’Ademe, puisque le secteur du numérique au sens large consomme déjà 10% de l’électricité que nous produisons (Rapport sur la sobriété numérique – Ademe).
+ Un risque pour la santé publique. En Californie, une étude récente s’alarme que les particules fines liées à la pollution des data centers pourraient, à terme, provoquer plus de morts que celles liées aux voitures (Fast Company).
+ Yolo sur l’eau ! Un échange de vingt questions avec ChatGPT nécessite l’équivalent d’une bouteille d’eau en refroidissement (Rapport Make AI less Thirsty – GIP). Microsoft rapporte une augmentation nette de 34% de sa consommation d’eau, Google 22% et Meta 3%, pour l’année 2023 (Data Center Dynamics). Pour répondre à cette demande, certains opérateurs réalisent parfois des forages illégaux directement dans les nappes phréatiques (Reporterre).
+ Pillage de terres rares. Plutôt que d’être utilisé pour les équipements liés à la transition énergétique, le cuivre est siphonné par le secteur de l’IA (Wall Street Journal). En Birmanie, l’appétit vorace du secteur de l’IA pour les terres rares nourrir un véritable « pillage » des ressources naturelles (ONG Global Witness).
Retour en grâce de l’énergie fossile
Conséquence de cet appétit énergétique vorace, l’industrie de l’IA stimule la production d’énergie fossile, en particulier le gaz naturel et le charbon. En effet, la production d’énergie renouvelables ne permet pas de suivre les pics de demande en énergie. Un effet collatéral qui tue dans l’œuf les efforts mondiaux pour atteindre la neutralité carbone (Reuters).
+ Microsoft a annoncé investir 3,3 milliards d’euros en Allemagne pour installer de nouveaux data centers près de la mine de charbon de Hambach. En Malaisie, l’industrie du charbon et du gaz profite à plein de la demande en électricité de l’industrie de l’IA (Reuters).
+ Aux États-Unis, les pics de demande en électricité liés à la consommation des data centers a forcé les autorités à acter la réouverture de la centrale Three Miles Island (Synth Média). L’agence Standard&Poor’s estime que de nouveaux gisements en gaz naturel seront exploités pour satisfaire la demande énergétique du pays (S&P Research). Un signal confirmé par Donald Trump, qui a annoncé révoquer le décret Biden interdisant de nouveaux forages de pétrole et de gaz offshore afin de répondre à la demande (Reuters).
Dépense et démesure : la fuite en avant de l’hyperscale
Plus grands, plus puissants, plus voraces, les data centers hyper scale sont les ogres qui abritent la puissance de calcul et le stockage des données du secteur de l’IA. L’effervescence du secteur alimente une course au gigantisme qui rend caduque la notion même de mesure.
+ Meta a construit dans le Minnesota un centre d’hébergement de données dont la longueur totale équivaut à 12 terrains de football. Le dernier né des complexes Amazon comprend 50 000 serveurs (Data Vampires (épisode 1) – Podcast Tech Won’t Save Us).
+ Microsoft et OpenAi ont, un temps, émis l’idée d’investir 100 milliards de dollars dans la construction d’un gigantesque complexe de la donnée, doté de 2 million de GPU pour une puissance globale de 5 GW. Un projet pharaonique qui nécessiterait une centrale nucléaire en propre pour être alimenté (Data Center Dynamics).
+ La planète comptabilisait 430 data centers hyperscale fin 2018. On en compte aujourd’hui plus de 1000 (Synergy Research Group). Et la fuite en avant n’est pas prête de s’arrêter. Microsoft a dépensé 50 milliards de dollars dans la construction de data center entre juin 2023 et juillet 2024 (Data Vampires (épisode 2) – Tech Won’t Save Us). Amazon a amorcé un plan d’investissement de 150 milliards pour l’expansion de ses centres de données.
AI shame ?
Alors même que les data centers qui alimentent le secteur de l’IA générative sont responsables de 2 à 3% des émissions globales de gaz à effet de serre, soit un impact équivalent à celui du secteur de l’aviation, cette gabegie écologique ne suscite pas de levées de bouclier équivalent au « flygskam » (la honte de voler en avion), remarque le journaliste technocritique Paris Marx (Data Vampires (épisode 2) – Tech Won’t Save Us).
+ En miroir, peut-être devrions-nous « détruire l’IA », suggère le chercheur critique Ali Alkhatib (Maybe We Should Destroy AI – Tech Won’t Save Us).